L’épidémie de Zika déjà bien installée en Martinique et Guyane

«Des mesures appelées à évoluer.» La ministre de la Santé, Marisol Touraine, a fait un point ce mercredi matin sur la situation en France et dans les territoires d’Amérique, sur l’épidémie de Zika, insistant sur la situation des femmes enceintes. «Nous suivons la situation en temps réel. Face à une situation d’alerte, tout est mis en œuvre pour garantir la sécurité de nos compatriotes et la protection des femmes enceintes, pour qui le risque est très élevé. Je me rendrai avant la fin du mois dans les départements français d’Amérique.»

D’abord des données précises : «L’épidémie est aujourd’hui installée en Martinique et en Guyane, avec respectivement 2 287 et 245 cas» présumés, a révélé la ministre. «Dix cas autochtones ont également été confirmés en Guadeloupe et un cas à Saint-Martin. Au total, depuis le début de l’épidémie dans les départements français d’Amérique, 20 femmes enceintes ont été détectées positives au virus Zika. Ces femmes font l’objet d’un suivi renforcé, aucune malformation n’a été détectée à ce jour. Deux cas de syndrome de Guillain Barré [des troubles neurologiques, ndlr] ont par ailleurs été pris en charge, l’un d’entre eux est toujours en réanimation au CHU de Fort-de-France.» S’agissant de la métropole, «neuf cas importés de Zika ont été pris en charge depuis le début de l’année. L’un d’entre eux, de retour en métropole après un séjour dans une zone touchée par le virus, présente une forme neurologique de l’infection».

Quelques cas de transmission sexuelle

Aujourd’hui, dans la très grande majorité des cas, l’infection est anodine. «Le virus ne donne lieu à aucun symptôme, ce qui complique sa détection et donc son endiguement, a noté la ministre. Dans des cas plus rares, les effets du virus sont plus graves et peuvent entraîner un syndrome de Guillain Barré, c’est-à-dire des complications neurologiques sévères. Le lien entre la contamination de femmes enceintes et le développement de malformations congénitales est par ailleurs très fortement suspecté.» A cela s’ajoute le fait que quelques cas de transmission sexuelle ont été notifiés. Sur ce dernier point, la ministre a annoncé qu’elle venait de saisir le Haut Conseil de la santé publique pour qu’il recommande ou non «l’emploi du préservatif pour les femmes enceintes ou en âge de procréer en zones d’endémie, ou dont le compagnon est suspect d’être infecté».

Les mesures – à coté bien sûr de celles sur la lutte antivectorielle, qui consiste à faire disparaître les lieux où le moustique se reproduit (eaux dormantes, etc.) – sont toutes centrées sur la femme enceinte. Ainsi, les Agences régionales de santé de Martinique et de Guyane ont désormais en charge «un suivi et une prise en charge spécifiques pour les femmes enceintes résidant dans les territoires concernés». A titre conservatoire, dans ces territoires, il est même recommandé de «différer les dons de gamètes et les assistances médicales à la procréation (AMP)». En somme, on arrête toutes procréations artificielles. La ministre a annoncé, également, un renfort des équipes hospitalières, en particulier en réanimation.

 «Informer, pas alarmer»

Enfin, on avait senti une divergence d’appréciation entre la ministre de la Santé et celle de l’Outre-mer sur le fait ou non de voyager dans ces régions pour les femmes enceintes. Marisol Touraine s’est montrée insistante. «Ma volonté n’est pas d’alarmer. Ma responsabilité est d’informer, de protéger en particulier les femmes enceintes». Et de répéter son conseil : «L’avis du Haut Conseil de la santé publique recommandait aux femmes enceintes ayant un projet de déplacement dans des territoires touchés de reporter leur voyage. J’ai officiellement formulé cette recommandation ce même jour, et je l’ai rappelée le 28 janvier dernier. Là encore, les zones concernées ne sont évidemment pas seulement les départements français d’Amérique. La même recommandation vaut pour tous les pays d’Amérique latine concernés.» 

Eric Favereau