Coignard – Thomas Thévenoud, le lépreux

La séance des questions au gouvernement, dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, ressemble parfois à une pièce de théâtre. Autour du personnage principal qui récite sa tirade, les seconds rôles multiplient apartés, pitreries et remarques cinglantes pour retenir l’attention du public.

Mardi 24 mai, l’attraction du jour était sans aucun doute la question posée par Thomas Thévenoud, député de Saône-et-Loire, devenu célèbre pour avoir quitté le gouvernement neuf jours après y être entré parce qu’il n’avait pas payé ses impôts pendant deux ans. Depuis qu’il a refusé de démissionner de son mandat de parlementaire, Thomas Thévenoud, banni du groupe socialiste, républicain et citoyen, siège comme non-inscrit. Il prend rarement la parole, mais, chaque fois, c’est un spectacle instructif et éventuellement distrayant.

Tout d’abord, il est seul. Autour de lui, c’est le désert, alors que n’importe quel autre de ses collègues attire autour de lui, quand il est au micro, celles et ceux qui veulent absolument être vus à la télé. Certains messieurs s’affublent même, ce jour-là, de vestes aux couleurs vives pour se faire remarquer.

Les Républicains se déchaînent

Mais Thévenoud fait le vide autour de lui. Sa question n’a aucun intérêt national puisqu’il défend l’emploi dans une entreprise de sa circonscription. Pourtant, c’est l’émeute sur des bancs du groupe Les Républicains. « Il faut Cahuzac pour lui répondre », s’écrie Bernard Accoyer. « Il est honteux qu’il puisse poser une question », s’exclame une de ses collègues. « Scandaleux », renchérit-il. Claude Bartolone, président de séance, est obligé de jouer du marteau pour faire cesser les insultes et autres noms d’oiseaux : « Il n’y a aucune raison de se mettre dans cet état », sermonne-t-il.

Emmanuel Macron se lève pour répondre. Le ministre de l’Économie figure parmi les rares responsables qui ont gardé une attitude mesurée à l’égard de Thomas Thévenoud, que ses anciens amis évitent comme la peste. Tout en condamnant les manquements de son ancien collègue, il refuse de se joindre à l’opprobre public dont celui-ci est l’objet. Il est même allé, début mai, dans la circonscription de Thomas Thévenoud pour rencontrer les salariés menacés de licenciement.

Mais là, dans l’hémicycle, il faut rester concentré pour répondre dans le brouhaha. Il se lance : « Monsieur le député, la meilleure façon de protéger l’emploi industriel, c’est… de payer ses impôts », crie une voix à droite, provoquant l’hilarité.

Ce fut, dans ce théâtre improvisé, la meilleure réplique de l’après-midi.