Université d’été : ça chauffe toujours chez les écolos

Samedi, Villeneuve d’Ascq : la chaleur grimpe et l’université d’été des écolos approche. Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale, se pointe sur l’estrade. L’amphi est une nouvelle fois bondé : près de deux mille militants sur les trois jours. Elle remercie les bénévoles et lance la campagne des régionales. Les prochaines semaines s’annoncent chargées. La secrétaire nationale appelle à «cesser les débats inutiles en internes» et à la «cohérence». Les militants applaudissent mais la chose s’annonce difficile. Le parti traverse une crise. Certains draguent le gouvernement, d’autres le Front de Gauche. Sans oublier ceux qui ne draguent personne. Durant ces trois jours, on a observé, une nouvelle fois, les débats et les divergences.

Un accueil mitigé pour le gouvernement

Jeudi, l’université d’été des écolos ouvre ses portes. A l’extérieur, des nuages. A l’intérieur, l’amphi affiche complet. En ouverture, la santé écologique. La ministre socialiste de la Santé, Marisol Touraine, est dans les parages. Les intervenants se succèdent. Certains lâchent quelques tacles en direction du gouvernement. Sur l’estrade, la ministre hoche la tête, un brin mécontente, et prend des notes. Le public applaudit. La députée européenne, Michèle Rivasi prend la parole. Elle félicite la ministre pour son combat contre le tabac. Puis, elle sort les crampons, accusant le gouvernement de laxisme à l’égard des laboratoires pharmaceutiques et des lobbys. Les applaudissements se multiplient. La conclusion approche. Marisol Touraine prend la parole. Elle répond à Michèle Rivasi pour défendre son bilan et son combat contre les lobbys. La ministre a le droit, elle aussi, à quelques (petits) applaudissements. Mais quand elle lance: «Je ne peux pas ici ne pas appeler au rassemblement dès le premier tour [des régionales] des forces de progrès!», des sifflets se font entendre. La ministre rétorque: «Sifflez-moi! Vous affirmez vos positions, moi les miennes».

Vendredi, la Secrétaire d’Etat au Numérique, Axelle Lemaire, et Laurent Fabius ont eu plus de succès. Le ministre des Affaires étrangères a réalisé un vrai numéro de charme. Il a remercié les écolos qui ont «toujours été au premier rang» avant de causer Cop 21. Puis: «Mes journées, mes nuits sont occupées à préparer la Cop 21.» La secrétaire nationale, Emmanuelle Cosse, en a profité pour rappeler que «l’exemplarité de la France ne doit pas être une accroche de communication». Et que «La France n’est pas au rendez-vous de la bataille sur la taxe sur les transactions financières». Avant son départ, Laurent Fabius avait encore soif d’applaudissements. Il a lâché: «François Hollande doit tenir ses engagements sur l’écologie avant la Cop21.»

La discorde des régionales

Vendredi matin, à Villeneuve-d’Ascq. Le soleil se lève, les premiers militants arrivent et s’installent au bar : l’heure du café. Jean-Vincent Placé est déjà dans tous les esprits. La veille, il a confié son «ras-le-bol» au Monde. Le sénateur juge «irresponsable» les alliances avec le Front de gauche lors des régionales. Et il a menacé de quitter le parti. Son départ n’effraie pas les militants. Le tout à distance : il est arrivé à Villeneuve-d’Ascq, vendredi après-midi, sous les flashs et micros, pour un passage éclair. Sa sortie a fait du bruit alors que la marche pour les régionales est déjà tracée. Les écologistes se présenteront sans le PS dans toutes les régions. Et il y a des discussions avec le Front de gauche dans quatre régions. Une stratégie qui agace l’aile droite écolo. «Ne pas s’allier dès le premier tour avec le PS dans le Nord ou en Paca, c’est éliminer la gauche et voter à droite lors du second tour pour faire barrage au FN : c’est suicidaire», explique François de Rugy, qui soutient François Hollande avec Placé, Barbara Pompili et Denis Baupin.

La bande attend sagement un signe du Président pour intégrer le gouvernement et «changer les choses de l’intérieur». La base n’entend pas les choses de la même manière. Jeudi soir, la tête de liste écologiste en Rhône-Alpes – Auvergne, Jean-Charles Kohlhaas, a fait monter sur l’estrade la porte-parole de leur alliance, Corinne Morel-Darleux (Parti de gauche). Lui a été applaudi. Et longuement. Emmanuelle Cosse, furieuse, était contre cette mise en scène. La réaction des militants donne une tendance. Ils ne veulent pas du PS aux régionales. Les avis sont plus partagés pour le Front de Gauche. Eric Coquerel, coordonnateur du Parti de gauche était présent, lui aussi vendredi. Il espère multiplier les alliances alors que Jean-Luc Mélenchon a tapé sur les Verts dans une interview à Sud Ouest. Du côté de la direction, toujours la même bande-son: l’écologie au centre, une tête de liste verte partout et les alliances se discutent au niveau des régions. Du cas par cas.

2017 : déjà dans les têtes

Quelques jours avant le début des journées d’été, la direction du parti répétait à l’envi que les débats prioritaires seront les régionales et la Cop 21. Mais Michèle Rivasi, députée européenne, a emprunté un autre chemin et posé le débat le premier jour. Elle souhaite créer un rassemblement pour la présidentielle de 2017 via une primaire. Les militants semblent partants. Elle en a profité pour balancer sa candidature. L’annonce n’a pas fait marrer Emmanuelle Cosse qui préfère se concentrer sur sa candidature en région parisienne. Elle devra tout de même se poser un peu et réfléchir à la question les prochaines semaines. Certains prennent de l’avance. Cécile Duflot, elle, ne parle plus à la presse, prépare sa rentrée avec un bouquin et bosse sur les présidentielles avec sa petite équipe. Elle est contre l’idée d’une primaire. La députée préfère endosser le costume du candidat naturel. Du côté de l’aile droite, le débat ailleurs. Ils veulent rentrer au gouvernement. Dans ce cas, difficile de ne pas soutenir le candidat PS en 2017. Et Jean-Vincent Placé sera-t-il encore membre EE-LV après les régionales ? Les solutions sont multiples, les incertitudes aussi. Mais la présidentielle, qui fait beaucoup de mal au parti à chaque fois qu’elle se pointe, torture déjà les cerveaux.