Mois : novembre 2015

Pylônes, l’énergie positive

Jacques et Lena Guillemet, couple fondateur de Pylônes, rêvent sûrement en couleur. Leur univers de cadeaux ultra-colorés, oniriques et ludiques, ils l’ont créé faute de trouver des cadeaux à leur goût. Ainsi naît en 1985 une première collection de gadgets en caoutchouc. Elle séduit illico. D’autres idées cadeaux, sympas et pas chères, suivent, destinées à faire sourire. Depuis, ont vu le jour chez Pylônes des sonnettes de vélo à motifs, une essoreuse à salade en forme de toupie, le bavoir requin-coquin, un oiseau porte-trombones et son fameux stylo-poisson. Tous des best-sellers, lancés sans étude de marché, mais chaque fois en phase avec la tendance. Et ça continue. « On peut passer chez Pylônes comme on va acheter un bouquet de fleurs, des chocolats ou une bouteille de vin à offrir. On est une solution cadeau d’objets de qualité et gais, pour la maison ou le bureau et dont les prix vont de 3 à 120 euros », précise Jacques Guillemet, rencontré ce mois-ci au siège social de la marque, installé dans une rue pavillonnaire de Colombes.

Une usine 100 % française… à Shenzhen !

Le nom de Pylônes n’a pas été choisi au hasard. « Le pylône, c’est d’abord un vecteur d’énergie, bien sûr », indique Jacques Guillemet. « Dans la campagne, il est un peu anachronique, mais certains sont vraiment magnifiques », ajoute ce fan de design industriel, comme son épouse, et tous deux anciens brocanteurs. « On a commencé en achetant à Drouot ce que personne ne voulait. On nettoyait et rénovait, puis on revendait dans les dépôts-ventes. Cela marchait très bien ! » Après des débuts artisanaux, c’est l’acquisition en 1995 d’une usine 100 % française à Shenzhen qui va permettre le décollage planétaire de Pylônes. Le secret de fabrication ?  « Chaque couleur est déposée à la main, soit en utilisant des décalcomanies, ou de la peinture à l’aéro. « On est les seuls à faire ça, c’est une folie », assure Jacques Guillemet. « On chérit même un peu les défauts, car c’est à eux que l’on reconnaît la trace de la main, c’est ce qui donne la chaleur et le charme aux produits. On fleurit les objets. C’est une façon d’offrir des fleurs. »

De Bogotá à Hong Kong

Depuis l’ouverture de la première boutique sur l’île Saint-Louis en 1987, « avec juste une micro-collection présentée en vitrine sur des tables bistrot, Pylônes a fait des petits. De Bogotá à Hong Kong, en passant par Prague, l’enseigne est présente dans soixante pays. Le succès de Pylônes, Jacques Guillemet l’explique par le langage universel de ces gadgets. « Cela vient du fait que l’on s’inspire de la nature. Nous privilégions le design anthropomorphe, zoomorphe. Cette inspiration-là est ancestrale et remonte aux hommes préhistoriques. On est dans un design extrêmement humain. D’ailleurs, dès que l’on ouvre une boutique, c’est un feu d’artifice. »

À peine arrivé à son bureau de Colombes, Jacques Guillemet fourmille d’idées. « C’est très amusant d’avoir la liberté, le matin dans le métro, d’inventer un objet. » Ce matin-là, il a imaginé un sac de courses qui pourrait aussi servir de protection de pluie. Une idée qu’il ne tardera pas à travailler avec l’équipe de designers maison, comme auparavant la brosse à cheveux dont rêvaient ses filles, ou un coffre à secrets de format identique à celui de son enfance.

© DR

Éphémère durable

Chez Pylônes, les bureaux ressemblent aux boutiques. La couleur est partout. Au rez-de-chaussée, à deux pas du show room et des bureaux de styles, se trouve l’atelier de fabrication de la ligne « Souffle de verre », des bijoux en verre soufflé rempli de perles, une collection-phare de la marque. Une autre porte, et voilà l’atelier de réparation où arrivent par la poste des modèles fatigués d’avoir servi. Expédiés par leurs propriétaires qui y sont très attachés, ils sont réparés sans attendre. « On est dans l’éphémère », avait pourtant assuré Jacques Guillemet. Mais quand l’affectif s’en mêle, il arrive que l’éphémère soit durable.

Une histoire de couple

À entendre Léna et Jacques Guillemet, si leurs points de vue divergent parfois, ils finissent toujours par s’entendre. Pour éviter de se marcher sur les pieds, ils se sont réparti les tâches : à elle, le design de chaque boutique, la communication visuelle, l’atelier de fabrication, la production. À lui, la direction artistique des produits et la partie administrative et financière. Ensemble, ils discutent des questions sociales, de la gestion humaine des 300 salariés de l’entreprise. Une question en suspens ? La suppression ou pas de l’accent circonflexe de Pylônes. Il est pour, elle est contre. À part cela, c’est ensemble qu’ils ont réuni récemment les salariés et leurs partenaires de tous les pays au musée des Arts forains. Histoire de fêter ensemble les 30 ans de leur aventure, entre jeux d’adresse et tours de manège.

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Hollande à Séoul : «Nous aurons besoin de la Corée» pour la COP21

Après Chongqing et Pékin, François Hollande a choisi de faire un détour par Séoul pour une étape éclair. Comme en Chine, cette visite présidentielle au pays du matin calme, la première depuis quinze ans, était placée sous le signe de l’environnement. Mais aussi de l’économie créative, le slogan phare de la présidente sud-coréenne Park Geun-hye.

Si François Hollande a tenu à souligner que l’économie n’était pas le but principal de sa venue, celle-ci s’est tout de même conclue par la signature d’une série d’accords de coopération en tout genre : en matière de recherche, d’innovation ou encore commerciaux, avec la commande de 55 avions Airbus par les compagnies Korean Airlines et Asiana. La journée avait par ailleurs démarré par une rencontre avec des start-up coréennes dans les locaux de D.Camp, un incubateur niché au cœur du riche quartier de Gangnam.

La Corée, très en avance sur les outils numériques, tente depuis quelques années de créer un écosystème favorable aux PME. Elle a notamment développé 17 centres d’innovations à cet effet. Mais dans une économie dominée par de puissants conglomérats ou «chaebols», la tâche n’est pas facile. «Beaucoup de jeunes Coréens n’osent pas dire à leurs parents qu’ils ne souhaitent pas travailler pour un grand groupe. Mais les mentalités sont clairement en train de changer», analyse Olivier Mouroux, cofondateur d’Asiance, une agence de communication digitale à Séoul. 

Un médiateur entre pays développés et émergents

Laurent Fabius et François Hollande ont chacun à leur tour chaussé des lunettes futuristes pour tester la réalité virtuelle pensée par une équipe franco-coréenne, l’une des entreprises invitées à démontrer leur savoir-faire pour l’occasion. Quant à Ségolène Royal, elle a posé aux côtés des jeunes chanteurs bien coiffés du boys band Block B. Si ce groupe de k-pop, la pop coréenne, était de la partie, c’est parce qu’il a joué dans la salle de concert parisienne le Bataclan, en février. Un concert à l’initiative de MyMusicTaste, autre start-up coréenne présentée ce mercredi, qui organise des concerts à la demande des fans.

Après un petit bain de foule au milieu des étudiantes de l’université féminine de Ewha, l’une des plus prestigieuses du pays, François Hollande et son équipe ont poursuivi leurs efforts diplomatiques pour préparer la COP21 qui s’ouvre à la fin du mois à Paris. «Après la Chine, c’est la même logique qui nous amène ici : nous aurons besoin de la Corée», a expliqué le président français lors d’une table ronde en présence du président du Giec, le Sud-Coréen Lee Hoesung, élu début octobre. Hollande a notamment insisté sur la nécessité pour les pays développés de partager les technologies avec les pays en développement. Le Fonds vert, organisme onusien basé en Corée qui vise à aider les pays émergents à combattre le changement climatique, était également représenté. La Corée, qui a annoncé en juin un plan de réduction de 37 % de ses émissions de gaz à effet de serre par rapport à un scénario constant, entend se poser comme une sorte de médiateur entre économies développées et émergentes sur les questions du réchauffement climatique.

La journée s’est conclue, en fin d’après-midi, par une rencontre au sommet entre les deux chefs d’Etat. Le président a été accueilli en grande pompe à la Maison Bleue, le palais présidentiel, par une cérémonie militaire millimétrée, au son des trompettes traditionnelles et des drapeaux des deux pays agités par un groupe d’enfants. La ministre de la Culture, Fleur Pellerin, et le sénateur Jean-Vincent Placé, accueillis comme des enfants du pays à Séoul, étaient également du voyage.

Eva John Correspondante à Séoul (Corée du Sud)

L’assureur AIG va supprimer des emplois après être tombé dans le rouge

New York – L’assureur amricain AIG, qui est sous la pression de l’influent investisseur activiste Carl Icahn, va supprimer des emplois dans le cadre d’une importante restructuration, aprs tre tomb dans le rouge au troisime trimestre.

La perte nette trimestrielle s’élève à 231 millions de dollars, selon un communiqué publié lundi, contre un bénéfice net de 2,2 milliards de dollars à la même période un an plus tôt.

Le groupe envisage une nouvelle réduction de la voilure en 2016 pour économiser en tout jusqu’à 500 millions de dollars par an.

Dans un document adressé au gendarme de la Bourse, la SEC, le groupe précise que quelques 400 postes seniors sont concernés.

Il a ainsi inscrit une charge de 500 millions dans ses comptes trimestriels, dont 300 millions destinés à des indemnités de licenciement et le reste pour moderniser ses plateformes technologiques.

AIG envisage aussi de continuer à se désengager des activités jugées non stratégiques et à faibles rendements, alors qu’il vient de boucler sa sortie du capital du groupe néerlandais AerCap.

« Les actions de restructuration mises en place au cours du trimestre dernier marquent des étapes importantes dans notre transformation pour devenir un groupe plus efficace, moins complexe et capable de répondre aux besoins de nos clients avec grande agilité« , essaie de rassurer le patron Peter Hancock, cité dans le communiqué.

– Dividendes –

En attendant, la performance courante d’AIG a déçu: le bénéfice opérationnel de 691 millions de dollars s’est traduit par un bénéfice par action ajusté, référence en Amérique du nord, de 52 cents, contre 1,03 dollar attendu en moyenne par les analystes.

Outre les charges, AIG a pâti de dépréciations de ses participations en Chine, notamment dans le groupe chinois PICC Property, et d’une hausse plus forte que prévu des accidents de la route aux Etats-Unis.

La division assurance grand public (assurance-retraite, assurance-vie ou personnelle), force traditionnelle, a ainsi vu son bénéfice opérationnel chuter de 40% à 596 millions de dollars, tandis que les gains de l’assurance commerciale (garanties d’hypothèques, sinistres et catastrophes) ont plongé de 34% à 815 millions de dollars.

Son chiffre d’affaires de 12,82 milliards de dollars est loin des 14,22 milliards espérés par les marchés.

A Wall Street, le titre perdait 3,04% à 61,80 dollars vers 22H35 GMT dans les échanges électroniques suivant la clôture de la séance.

Malgré ses pertes, le groupe a promis de distribuer un dividende de 28 cents par titre et va également reverser indirectement 602 millions de dollars via des rachats d’actions à ses actionnaires.

Ces annonces tombent au moment où AIG, sauvé de la faillite en 2008 par l’Etat fédéral, est sous la pression des investisseurs activistes américains John Paulson et Carl Icahn.

Ce dernier vient de prendre une « importante » participation dans l’assureur et réclame sa séparation en trois entités indépendantes.

L’une d’entre elles se spécialiserait dans l’assurance des prêts immobiliers (assurance invalidité notamment), une autre dans l’assurance-vie et la dernière dans la couverture des dommages et sinistres.

Ce schéma aurait l’avantage de dispenser l’assureur de renforcer ses fonds propres par exemple et de doper son cours de Bourse, défend M. Icahn.

AIG est considéré actuellement par les régulateurs américains comme un groupe financier systémique, dont la taille est telle qu’une éventuelle faillite se répercuterait sur l’ensemble du système financier. Il est donc soumis à des exigences de liquidités très élevées, qui n’auraient plus lieu d’être après un démantèlement.

L’assureur, qui doit tenir une conférence téléphonique ce mardi avec les analystes, est en discussion pour donner son indépendance à l’activité de prêts, selon la presse américaine.

Pour tourner le dos à une diversification tous azimuts qui avait failli le faire disparaître durant la crise financière, AIG est en train de se recentrer sur son coeur de métier l’assurance et a fini par rembourser à l’Etat fédéral les 180 milliards de dollars prêtés en 2008.

Jungle de Calais : la justice ordonne des aménagements sanitaires

La justice a ordonné lundi à l’Etat de réaliser divers aménagements sanitaires au sein de la Jungle de Calais, où vivent quelque 6 000 personnes dans des conditions précaires, répondant seulement en partie aux demandes des ONG qui avaient saisi le tribunal en urgence. Soulignant «l’urgence caractérisée» de la situation sur le campement, le tribunal administratif de Lille a ordonné à la préfète du Pas-de-Calais et à la commune de Calais de créer dix points d’eau supplémentaires comportant chacun cinq robinets, cinquante latrines et «un ou plusieurs accès» pour les services d’urgence.

Médecins du monde et le Secours catholique, soutenus par d’autres ONG, avaient déposé un recours «en vue de mettre fin aux atteintes graves aux libertés fondamentales» des migrants vivant dans ce camp situé sur une lande et dont le nombre a quasiment doublé depuis la fin du mois de septembre.

A lire aussi : Jungle de Calais : l’appel des 800

La justice administrative a également ordonné la mise en place d’un système de collecte des ordures et le nettoyage du site. Toutes ces mesures doivent être concrétisées dans un délai de huit jours, «sous astreinte pour chacune d’elles de 100 euros par jour de retard».

Il est également demandé à la préfecture du Pas-de-Calais «de procéder, dans un délai de 48 heures à compter de la notification de la présente ordonnance, au recensement des mineurs isolés en situation de détresse et de se rapprocher du département du Pas-de-Calais en vue de leur placement».

L’avocat des ONG, Me Patrice Spinosi, a salué une décision constituant «une première victoire», même si elle «n’est pas satisfaisante pour autant, en particulier concernant le démantèlement du camp, que nous continuons de réclamer et sur l’accès aux soins».

D’autres requêtes des associations ont été rejetées, dont l’allocation de bâtiments inoccupés au logement temporaire et d’urgence des pensionnaires du camp, ou encore la distribution au centre Jules-Ferry de deux repas par jour pour l’ensemble des 6 000 migrants, contre actuellement 2 500 repas une seule fois par jour.

L’Etat se réserve le droit de faire appel

Dans un communiqué, la Préfecture du Pas-de-Calais a noté «avec satisfaction» que «le juge n’a pas retenu à l’encontre de l’Etat les manquements allégués par les requérants, du fait des mesures déjà prises», notamment en matière d’accès à l’asile, d’hébergement des personnes vulnérables et d’accès à la santé. «Les marchés correspondants souhaités par le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve vont même au-delà des injonctions aujourd’hui formulées par le juge», en matière de nettoyage, de collecte des déchets et d’installation de latrines par exemple, dont la mise en œuvre «interviendra avant le terme des huit jours fixés par le juge», a affirmé la Préfète. L’Etat se réserve toutefois le droit de faire appel «sur la question de principe», souligne le communiqué.

A Médecins du Monde, Jean-François Corty, directeur des missions France, s’est félicité d’une «forme de victoire» car «le juge a contraint les autorités à prendre des mesures d’urgence», ce qui est selon lui «assez exceptionnel». Médecins du Monde se réserve toutefois «la possibilité de faire appel» dans un délai de 15 jours.

«On a fait bouger l’Etat et on a forcé la justice à fixer un cap», a pour sa part affirmé Bernard Thibaud, secrétaire général du Secours catholique. Mais «on est encore loin de la mise à l’abri de l’ensemble des personnes» réclamée par les ONG, a-t-il ajouté, en affirmant son intention de «rencontrer le ministère de l’Intérieur dès que possible pour connaître les modalités des engagements qu’ils ont pris devant le juge» en matière de santé notamment, et pour veiller au respect de ces promesses.

AFP

Aéronautique: la Chine dévoile le C919, son premier avion moyen-courrier

Shanghai – Tout juste assembl, le premier exemplaire du C919, moyen-courrier conu par l’avionneur chinois Comac pour bousculer le duopole Airbus-Boeing, a t dvoil lundi, mais il faudra encore longtemps avant que ne dbutent les livraisons de cet appareil emblmatique des ambitions aronautiques de Pkin.

Tiré par un petit camion, l’avion long de 39 mètres, de couleur blanche avec un aileron vert, est sorti d’un colossal hangar décoré du drapeau chinois pour être présenté devant un public choisi, a constaté un journaliste de l’AFP.

Il aura fallu plus d’une année pour assembler ce premier C919 sur le site shanghaïen de la Commercial Aircraft Corp. of China (COMAC), un groupe sous contrôle étatique dont Pékin veut ouvertement faire un concurrent pour l’européen Airbus et l’américain Boeing.

« La sortie du C919 marque une étape importante dans le développement du premier avion de conception chinoise« , s’est réjoui le président de la Comac, Jin Zhuanglong, lors de la cérémonie.

Avec cet appareil d’une capacité de 168 passagers et d’une portée de 5.555 km, la Comac espère rivaliser sur les vols régionaux avec les deux « stars » internationales du moyen-courrier, le B737 de Boeing et l’A320 de Airbus.

Et ce alors que le marché chinois connaît une croissance insolente: avec une demande dopée par l’essor de la classe moyenne, la Chine aura besoin de 6.330 avions de ligne sur les vingt années à venir, selon des projections de Boeing, qui table sur un triplement de la flotte du pays durant cette période.

« Le secteur du transport aérien ne peut se reposer uniquement sur des importations. Une grande nation se doit d’avoir son propre grand appareil commercial« , a affirmé lundi Li Jiaxiang, patron de l’aviation civile chinoise (CAAC).

Pour autant, le C919 a aussi profité de technologies étrangères: il est ainsi équipé de moteurs Leap développés par l’américain General Electric et le français Safran au sein de leur coentreprise CFM International. Celle-ci fournit aussi la nacelle et les inverseurs de poussée.

Le montant des investissements dans le développement du C919 n’ont pas été dévoilés, mais une banque étatique (Export-Import Bank of China) avait précédemment annoncé qu’elle accorderait près de 8 milliards de dollars de fonds à la Comac pour ses projets d’avions.

-‘Encore du travail’-

Le C919 accomplira son premier vol d’essai courant 2016, a ajouté M. Li: un nouveau retard notable alors que la Comac avait envisagé de le faire voler d’ici la fin de l’année, et après avoir déjà multiplié les contretemps.

Dans ces conditions, le voyage inaugural pourrait n’intervenir qu’en 2017, selon des informations du journal officiel China Daily.

La Comac assure avoir déjà enregistré 517 commandes pour l’appareil, presque exclusivement de la part de compagnies chinoises: parmi les rares marques d’intérêt étrangères, figure une commande 10 avions par le thaï City Airways, dévoilée le mois dernier.

Mais il faudra encore des années avant que les premières livraisons soit honorées: d’après les experts, le C919 ne devrait entrer en service qu’en 2019 au plus tôt… et de nouveaux retards ne sont pas à exclure.

« Il y a encore énormément de travail à accomplir« , a souligné Briand Greer, président pour l’Asie-Pacifique de Honeywell Aerospace, un groupe américain qui fournit lui aussi certains éléments clefs du C919 (roues et freins, instruments de navigation).

Parmi les obstacles à surmonter, « il faudra encore beaucoup de tests, de vols-tests, de tests des systèmes d’intégration, et bien entendu il faudra décrocher la certification« , a-t-il déclaré à l’AFP.

Sur ce point, l’ARJ-21, le premier avion de transport régional conçu et produit par la Comac, a connu de multiples déconvenues.

Quatorze ans après le lancement du programme en 2002, et six ans après son premier vol en 2008, ce bimoteur de 79 à 90 places, concurrent potentiel des avions du Canadien Bombardier ou du Brésilien Embraer, n’a été certifié que fin 2014 par les autorités chinoises, ce qui lui ouvre les pistes pour les vols intérieurs.

Mais il lui reste encore à décrocher la certification-clé pour voler à l’international, celle de l’Administration fédérale américaine de l’aviation civile (FAA).

En attendant, la Chine s’est d’ores et déjà donné un nouveau défi technologique ambitieux: concevoir au cours de la prochaine décennie son premier long-courrier, le C929, un bicouloir susceptible de prendre son envol au début des années 2020.

Double meurtre à Echirolles : le procès d’une meute

Au soir du 28 septembre 2012, Kevin Noubissi et Sofiane Tadbirt ont été lynchés. Au cœur d’Echirolles, une ville du sud de l’agglomération grenobloise. Le procès de leurs douze meurtriers présumés s’ouvre ce lundi après-midi à Grenoble, devant la cour d’assises des mineurs de l’Isère. Les accusés, dont deux étaient mineurs au moment des faits (les autres étaient âgés de 18 à 21 ans), avaient pour la plupart été rapidement interpellés. Trois d’entre eux ont été libérés sous contrôle judiciaire en cours d’instruction, les autres sont détenus dans neuf prisons différentes. Ils comparaitront pour meurtre, c’est-à-dire homicide volontaire sans préméditation, et encourent une peine de trente ans de réclusion.

«On va revenir !»

Le jury et la cour n’auront pas trop de six semaines pour aboutir à un verdict dans cette affaire où les responsabilités sont confuses. Car Kevin et Sofiane, 21 et 22 ans, étudiant en licence pro et éducateur, appréciés dans leur quartier des Granges à Echirolles, sont morts au terme d’une action de représailles collective. Leurs agresseurs, soudés par leur appartenance au quartier de la Villeneuve, à Grenoble, situé à quelques centaines de mètres des Granges, ne leur ont laissé aucune chance : «C’est une horde sans réflexion, animale et dévastatrice qu’ils ont dû affronter, y laissant la vie. Leurs dépouilles massacrées témoignent d’un phénomène barbare et sauvage qui reste très difficile à analyser», précise une source proche du dossier. «Il ne s’agit pas de bagarre entre bandes, de lutte de territoires pour contrôler un trafic quelconque, de rivalité communautaire ou raciste. Nous nous trouvons face à une scène de violence barbare de la vie ordinaire», a écrit la mère de Kevin dans son livre le Ventre arraché (1).

Comment établir les responsabilités dans ce massacre collectif: si les enquêteurs ont pu établir fermement la participation de ces douze jeunes à la rixe mortelle, leurs rôles précis n’ont pas pu émerger d’une instruction marquée par la loi du silence. Qui a porté les coups de couteaux fatals ? Qui avait l’intention de tuer ?

Tout part d’une bagarre entre Wilfried, frère cadet de Kevin, et un jeune de la Villeneuve, Abou. Une histoire de fille les oppose depuis un an. Après quelques coups, ils se séparent. Ils se retrouvent une heure plus tard, cette fois tous deux accompagnés d’amis. Nouvelle bagarre : un ami d’Abou, Sid-Ahmed, prend un coup et saigne. Troisième acte : le grand frère de Sid-Ahmed, Mohamed El Amine, un militaire, arrive en renfort avec des amis de la Villeneuve. Les coups pleuvent puis Mohamed El Amine asperge Wilfried et ses amis avec une bombe lacrymo et les met en fuite. Wilfried appelle alors son grand frère, Kevin, qui le rejoint avec son ami Benjamin. Quatrième affrontement : le groupe mené par Kevin retrouve aux Granges celui de la Villeneuve. Kevin, solide sportif, gifle Mohamed El Amine et lui arrache des excuses pour avoir frappé et gazé son petit frère. Ceux de la Villeneuve se replient mais avertissent : «On va revenir !» Mohamed El Amine a été humilié, ainsi que ses amis. La «fierté du quartier» est désormais en jeu.

Il est 20 heures, les jeunes de la Villeneuve se réunissent place des Géants, au cœur de la partie sud du vaste quartier populaire grenoblois. Surexcitation, alcool, amis appelés en renfort. Il faut laver l’honneur de la cité, «défoncer» ceux des Granges. Au sein de ce groupe, si beaucoup, comme Mohamed El Amine, n’ont pas d’antécédents judiciaires, six autres au moins ont des faits de violence en réunion ou avec arme à leur passif. On réunit à la hâte massettes, pieds-de-biche ou gourdins, mais aussi des pistolets d’alarme en plus ou moins bon état, des couteaux…

«Hurlements à mort»

En petits groupes, à pied ou à scooter, ils sont une quinzaine à se mettre en route. Dans le parc Maurice-Thorez, aux Granges, Kevin, Wilfried et Benjamin, rejoints par deux amis, Sofiane et Mickaël, attendent le retour des jeunes de la Villeneuve. Vers 21 heures, alors qu’ils s’apprêtent à se séparer et que Kevin a ordonné à son frère de rentrer chez lui, les assaillants débarquent par différents accès du parc. L’affrontement éclate immédiatement, Wilfried s’enfuit. La bataille est violente, confuse, émaillée de poursuites, auxquelles participe un chien, selon les témoins qui entendent «cris, hurlements à mort et insultes», ainsi que plusieurs détonations. Sofiane, submergé par une demi-douzaine de personnes, est battu à coups de marteau et assommé avec une bouteille en verre alors qu’il tente de se relever. Benjamin veut le secourir, frappant avec une arme défectueuse arrachée à l’un des assaillants. Des coups de feu sont tirés dans sa direction, un chien lâché : il s’enfuit. Kevin tente à son tour d’extraire son ami de la mêlée mais face aux coups, il tente de s’échapper. Sofiane, à terre, va être lardé de 31 coups de couteaux, battu encore, écrasé par un scooter. A 60 mètres de là, Kevin, rattrapé, est aussi au sol. Il reçoit huit coups de couteau, dont un mortel, subit un tir de pistolet à blanc sur le front, des coups de pieds. Les assaillants filent. La scène n’a duré que quelques minutes. Kevin décède durant son transport vers l’hôpital ; Sofiane meurt le lendemain, malgré les efforts des chirurgiens.

Certains accusés étant mineurs au moment des faits, les audiences devraient se dérouler à huis clos. Néanmoins, si les avocats des accusés le demandent, le procès peut être public. Les familles de Kevin et Sofiane le souhaitent, précise leur avocat, Francis Szpiner, «pour que leurs enfants ne soient pas morts pour rien et que le procès permette de réfléchir à comment des querelles banales peuvent déboucher sur des drames».

Denis Dreyfus, avocat de Mohamed El Amine, souhaite lui aussi voir «une partie des débats ouverts, au nom de la transparence, pour éviter une espèce de double procès, entre l’audience et ce qui s’en dira à l’extérieur». On saura dès ce lundi après-midi si les défenseurs des accusés mineurs au moment des faits demandent la publicité et si la cour l’accorde. Quoi qu’il en soit, les avocats des accusés s’apprêtent à batailler contre le chef d’accusation unique, l’homicide volontaire, appliqué conjointement à tous les accusés, qualifiés de «coauteurs des meurtres». «Je souhaite l’individualisation : tous n’ont pas le même parcours, ni les mêmes profils, explique Arnaud Levy-Soussan, avocat de deux d’entre eux. Par ailleurs, l’accusation mêle les deux homicides, indistinctement. Cela me paraît extravagant. Il faut que le procès permette de préciser qui a fait quoi et à quel moment. Chacune des victimes a été achevée par une personne bien plus déterminée que les autres !»

Denis Dreyfus, qui défend El Amine, est interrogatif : «L’intention homicide est-elle commune aux douze accusés ?» Son inquiétude est de voir le jury et la cour «emportés par l’émotion, mettre tout lemonde dans le même sac». Il compte à l’audience sur une reconstitution précise des faits aboutissant aux meurtres pour établir la réalité des charges pesant sur chacun et préciser l’effet de meute, «fondamental dans le passage à l’acte» en l’absence de préméditation.

Participation active

Bernard Ripert, qui défend deux des accusés, est allé très loin en décembre, dénonçant l’instruction et évoquant un «Outreau grenoblois». Joelle Vernay, avocate de deux des accusés, frères, avait affirmé qu’il y avait «des innocents» parmi les douze : ceux qui n’auraient pas porté de coups de couteaux… Ces arguments ont peu chance de porter, analyse Didier Rebut, professeur de droit pénal à Paris-II. Sur l’intention homicide d’abord : «La jurisprudence est unanime : lorsque les violences sont telles qu’elles peuvent entraîner la mort avec probabilité, un individu ne peut prétendre qu’il n’a pas voulu donner la mort. Il ne peut se dédouaner en disant qu’il n’avait pas d’intention homicide.»Et sur le fait que les accusés sont considérés comme comeurtriers : «Là encore, la jurisprudence est établie : dans le cadre de ce qu’on appelle « une scène unique de violence » à laquelle plusieurs individus participent activement, tous sont considérés comme auteurs, quel que soit celui qui a porté les coups fatals, même s’ils n’ont fait que tenir la victime ou l’empêcher de se relever.»

Francis Szpiner, l’avocat des familles, insiste : «Sofiane n’a pu se relever, tous ceux qui l’en ont empêché et ont empêché ses copains de venir l’aider sont coauteurs du meurtre. Ils ont agi collectivement, la coaction est une réalité juridique ! Ensuite, bien sûr, il y a une hiérarchie dans les responsabilités et il faudra individualiser les peines.»

Les jurés grenoblois, pour prononcer une même culpabilité de meurtre pour chacun des douze accusés, devront être convaincus de la participation active de chacun à la rixe mortelle. La loi du silence, sur fond de menaces entre coaccusés, pourrait sérieusement compliquer leur tâche.

(1) Aurélie Monkam Noubissi, Bayard, 2014.

François Carrel Correspondant à Genoble