Coignard – Montebourg, gonflé à l'hélium

« Je suis le candidat de la transformation concrète du système économique et financier, politique et européen », a déclaré avec le plus grand sérieux Arnaud Montebourg, mardi 3 janvier sur RTL. L’ancien député de Saône-et-Loire a oublié de mentionner ce qu’il entend changer à la planète, et – pourquoi pas ? – à la stratosphère. Un peu plus tard, il n’hésite pas à parler de lui comme de l’homme universel : « Les convictions sont constantes, les combats sont les mêmes. » L’usage du déterminant possessif lui paraît-il trop réducteur ?

« Je veux réorienter le système financier, le mettre au service de l’économie réelle. C’est la vision de la finance patriotique », martèle-t-il, avant de se situer dans une illustre généalogie : « Je veux rassembler l’ensemble de forces productives, ce que j’ai fait lorsque j’étais à Bercy, de la CGT au patronat, on défendait nos usines et on a eu des résultats. D’une certaine manière, Jean-Pierre Chevènement comme Dominique Strauss-Kahn sont dans cette filiation, comme d’ailleurs Colbert, Turgot, toute l’histoire de la construction de notre industrie… » Puis il choisit finalement une autre comparaison, qu’il fallait oser : « Je suis un petit peu comme, finalement, Victor Hugo lorsqu’il exaltait le travail fier… »

L’ivresse du succès

On imagine mal, toutefois, Victor Hugo, Colbert ou Turgot draguer les bas salaires en direct en proposant de rendre à chacun plus de cent euros net par mois via une baisse drastique de la CSG comme le fait Montebourg en direct. Où prend-il les six milliards que coûte cette mesure ? Dans le CICE accordé aux entreprises. Et pourquoi pas se réclamer aussi de Robin des Bois ?

L’ancien ministre du Redressement productif, il est vrai, a fait depuis longtemps de l’enflure narcissique l’une de ses marques de fabrique. Après le succès de son livre La Machine à trahir (Denoël), en 2000, il ne passe plus les portes. Dans la biographie qu’il lui consacre, Montebourg, l’homme-girouette (La Découverte), le journaliste Frédéric Charpier attribue à Pierre Joxe, son premier mentor en politique, une citation d’une grande cruauté pour commenter l’ivresse qui s’empare de son jeune protégé : « Le succès l’étourdit. Peut-être faudrait-il, comme on le fait pour les papes, lui brûler de l’étoupe sous le nez, pour lui rappeler que le succès est éphémère. »

Éphémère, peut-être, mais tellement revigorant. Durant la campagne pour la primaire de 2011, Arnaud Montebourg, raconte Frédéric Charpier, était tout content d’un immense fait d’armes : « J’ai fait la meilleure audience de la saison chez Ruquier. » On est loin de Victor Hugo !